Didier Lestrade


En cherchant sur Google la fréquence d'occurrence d'une expression, on est tombé par hasard sur le blog de Didier Lestrade, visiblement tout récent. Cela nous a fait faire un bond de plus quinze ans en arrière, quand on achetait Libération le jeudi, et uniquement le jeudi, pour lire la colonne disco / soul / house de D. L. On y appréciait une liberté d'esprit qui faisait se côtoyer les tubes house les plus commerciaux et les expériences techno les plus radicales, mais aussi, en plus d'une réelle culture musicale et d'un goût très sûr, un style camp à souhait, hyper référentiel, qui réjouissait par sa follitude débridée ou touchait par une nostalgie parfois lyrique.

Voici deux exemples parlants - deux maxis que l'on avait achetés à l'époque et que l'on a conservés.

CLUB 69
Let Me Be Your Underwear
Barclay

Je serais vraiment furieuse si ce disque n'est pas un hit en France dans deux mois. Après tout, ça a été un tube partout ailleurs et avec une pochette aussi Marky Mark, comment peut-on se tromper ? Club 69 est une autre production autrichienne de Peter Rauhofer, responsable du Danube Dance de Danube. Et les gadgets sont tous là : bouts parlés de discraciadas lascives, samples de Jocelyn Brown, murmures orgasmiques commerciaux. etc. Le maxi comporte cinq mixes dont un Boxer Short Piano dub très Sound Factory, idéal pour ces clubs remplis de mecs en sérieuse montée d'hormones. Garage parfait pour se rendre ridicule sur une piste de danse ou pour participer à ces concours de Best Club Kid USA qui ont lieu au Palladium, à New York.



SAFFRON
Circles
WEA

Allez directement au bout de la face B. Le Suprême Instrumental est fantastique. Toujours ces mixes de Franckie Knuckles construits comme des opéras qui paraissent retenus pendant les deux premières minutes et qui, soudain, s'ouvrent en se dépliant jusqu'à la fin du morceau. Grand piano, violons symphoniques, basse garage, snares mixés droit devant : le grand jeu orchestral et un énorme tourbillon house. Comment dire, après tous ces disques, quelque chose de nouveau sur Frankie Knuckles ? À 45 ans, ce type est le daddy de la house américaine, et son travail n'a malheureusement plus rien à voir avec ce que les gosses achètent aujourd'hui. Non seulement on trouve de moins en moins de disques remixés par lui, mais on dirait que tout son savoir-faire est accaparé par un besoin de perfection qui n'aboutit jamais aussi bien que dans ces petits mixes instrumentaux, vides de toute présence humaine. On pourrait très bien imaginer ce disque comme le tout dernier de sa carrière tellement il est pur. C'est cette nouvelle dimension de loser qui rend d'ailleurs ces produits si désespérés et beaux. Nous assistons à la disparition progressive d'un pan entier de la house moderne. A mon avis, les mixes viennent dans le studio de Frankie Knuckles pour mourir.



Commentaires

  1. Excellent, et hétéro-friendly, malgré tout. Knuckles est un esthète, oui. J'aurais aimé mentionner, pour ma part, bien platement, au regard du style de haute qualité de DL, le Undergroud Club Mix du "Erotica" de Maddonna par les Masters at Work (1992). Dans le genre, on se retient et puis ça part d'un coup dans le lourd, c'est assez enthousiasmant. A 1:42, les femmes vous arrachent votre chemise Cyrillus. Lien : http://mawforever.blogspot.com/2009/01/madonna-erotica-1992.html

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  2. C'est vrai qu'au regard de la production house d'aujourd'hui, on n'a qu'une envie : revenir à cette période bénie.

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  3. woa, merci pour le compliment.
    Et moi qui travaille sur ces archives de musique...
    bises
    didier

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